mardi 12 février 2013

Jules Renard vu par Tristan Bernard

C'est toujours un peu malgré lui que l'ironiste Jules Renard, dont on vient de jouer aux Escholiers un petit chef d-œuvre, le Plaisir de rompre, figure dans la collection des auteurs gais. Il rit de beaucoup de choses. Mais il vous dira que ce n'est pas sa faute, et que c'est les choses qui ont commencé. Il ne rit pas en tout cas pour faire rire, il rit parce qu'il voit des choses ridicules, autour de lui et en lui. Les petites vanités, les petites hypocrisies qu'il trouve en lui-même, il s'en châtie impitoyablement. Il se prend par le bout de l'oreille et s'attire au grand jour pour se donner la correction devant tout le monde. Voyez cet homme terrible, au front menaçant, aux yeux aigus, c'est le père Fouettard de lui-même.
Et l'étant de lui-même, il l'est de l'humanité. Nos petits neveux, qui n'auront pas de peine à le retrouver parmi la foule de leurs grands-oncles, lui seront reconnaissants d'avoir mis de côté pour eux, dans la cassette de sa phrase durable, toutes les trouvailles précieuses qu'il a faites dans son âme.
(Tristan Bernard, Le Rire, n° 25, 27 mars 1897.)

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