jeudi 1 novembre 2012

Jules Renard vu par René Benjamin 8/10

Suite d'hier.
Ah! Le cas de Renard et de Becque est un cas douloureux. Quand nous résumons les œuvres de ces deux hommes, nous y voyons cependant, pour ne pas être injustes, qu'elles sont pleines d'une certaine perfection, que tout y est voulu, prévu, et admirablement bien fait, constamment bien fait. nous disons: Quel art! Tout est combiné comme par un horloger qui fabrique de jolies montres.Lorsque Mme vigneron, dans Becque, pleure et geint, c'est que Becque a bien l'intention de la faire pleurer et geindre, et il se sert du grand comique qui se dégage des répétitions en la faisant geindre et pleurer trois fois de suite. Tout est si bien combiné pour les filles que nous savons que Becque a pensé d'abord à en mettre deux, puis il s'est dit:
- On m'objectera la brune et la blonde. C'est trop facile. il faut en mettre trois, au nom de l'art.
Et il en a mis trois.
Je vous dis que tout est parfait quand on y regarde de près, tout est délicieusement voulu par un artiste. Si donc on croit à l'art d'abord, avant d'aimer la vie, il faut saluer Becque et Renard et les bien relier et les mettre à la place d'honneur, dans la bibliothèque. Mais si on s'aperçoit, au contact des très grands, des génies, de ce qu'il y a de supérieur et d’enivrant en eux, alors on est dérouté quand on revient à ceux-là.
Suite demain.
(René Benjamin, Conférencia, n°10, 1er mai 1926.)

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