mercredi 10 septembre 2014

Jules Renard vu par Léon Daudet 5/5

Comme il produisait relativement peu, à la fois par manque de fécondité et par scrupule littéraire, ses confrères et la critique lui témoignaient une indulgence relative. On lui savait gré de ne pas tenir trop de place. Mais, lui, démêlant leur mobile, ne leur rendait pas la pareille, ah, bigre non! A une époque, il faisait des armes avec assiduité, dans l'intention, disait-il avec un sourire pincé, d'en supprimer un". Il ne spécifiait pas lequel. Chacun pouvait ainsi se croire privilégié. Au sortir de l'assaut, il avalait avec satisfaction un grand verre de vin blanc sec, à la paysanne, et soupirait: "Quel art difficile, - un temps, - mais indispensable! Il expédiait souvent sa pensée toute crue, afin qu'on la prît pour un paradoxe.
Il est mort jeune, après une maladie cruelle, où il montra un magnifique courage. En général, les bons écrivains, comme les bons soldats, savent mourir.Au lieu que les politiciens et les médecins ont peur de la mort. Chacun, en regardant autour de soi, pourra corroborer cette remarque, qui comporte, bien entendu, des exceptions.
Fin.
(Léon Daudet, L'Entre-deux guerres, Bernard Grasset, 1932.)

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