dimanche 3 mars 2013

Génèse de la "Demande" 1/3

Une pièce de Jules Renard
Deux ans, presque jour pour jour, après la mort de Jules Renard, Poil de Carotte fait son entrée à la Comédie-Française: en honorant la mémoire d'un de nos écrivais les plus regrettés, la maison de Molière se fait, du même coup, grand honneur.
Il est entendu que Poil de Carotte reste et restera le chef d’œuvre de l'auteur de ces Histoires naturelles qui sont si vite devenues un classiques!
Le Plaisir de rompre, Le Pain de ménage, Monsieur Vernet et La Bigote semblent, avec Poil de Carotte, résumer tout l'effort dramatique de Jules Renard. Dans la nomenclature qu'il plaçait, selon l'usage, en tête de ses livres, il n'en figure, en efet, pas d'autre.
Pourtant, il y en a une autre; et cette autre, c'est La Demande, qui fut sa première manifestation au théâtre et dont voici l'histoire:
En 1892, le secrétaire de la rédaction de l'hebdomadaire Art et Critique, de Jean Jullien, consacrait dans cette revue, quelques lignes de chaleureux éloge à l’Écornifleur, qui venait de paraître. Touché du procédé, Jules Renard voulut faire la connaissance du signataire de l'article.
Quelques jours après, notre ami commun Marcel Schwob nous présentait l'un à l'autre et Renard m'offrait un des exemplaires, déjà très rares à ce moment, de ses Sourires pincés. 
Il y a, là dedans, le roman navrant d'une pauvre laideronne de village qui, sur la foi des arrangements de son père (un fermier cossu), se croit, enfin, demandée en mariage, et s'aperçoit - après une manière de repas de fiançailles au cours duquel le prétendu ne lui a pas adressé une parole de tendresse - que c'est sa jolie sœur cadette que le galant recherchait...
Vivement frappé par cette émouvante figure de sacrifiée, en qui je trouvais comme une première ébauche de Poil de Carotte, je dis à Renard, dès notre première rencontre:
- Il y a dans La Demande matière à un acte très intéressant: voulez-vous m'autorisez à l'en tirer?
- C'est que, répondit Renard, je l'ai déjà fait moi-même. 
Suite demain.
(Georges Docquois, Le Figaro, 27 mai 1912.)

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