dimanche 9 septembre 2012

Jules Renard vu par victor Méric 5/6

Suite d'hier.
Ce doit être chez Jules Renard une préoccupation constante que de donner en une formule brève une vision complète des choses observées.On l'imagine volontiers à travers la campagne, marchant sans hâte, regardant autour de lui, s'arrêtant pour examiner une bestiole sur un brin d'herbe, contemplant des bœufs pensifs ou suivant des vols d'oiseaux à travers les branches. Son œil ne cherche pas à embrasser les ensembles, mais va droit au détail. Il cherche l'image.
Il s'est appelé lui-même le chasseur d'images. Et c'est bien ça. Il va à la chasse chaque jour. Le soir, il ouvre sa besace, répand le contenu sur sa table, et laborieusement, méticuleusement, passionnément, cherche la pièce rare, le gibier de prix. C'est que Jules Renard est un écrivain très exigeant. Il ne saurait se contenter de puiser dans le tiroir aux métaphores où chacun prend son bien. Il lui faut du neuf, quelque chose qui n'est pas été senti encore, pas exprimé jusque là. 
Et l'image découverte, il la tourne, la retourne, l'épluche, la rogne, jusqu'à ce qu'elle devienne lumineuse de netteté, de précision, de justesse. Et c'est en même temps très simple et très compliqué, très naturel et très maniéré, chargé de poésie et mouillé d'ironie. C'est un bijou unique, discret, savoureux, exquis, doux au palais.
Suite demain
(Flag, alias Victor Méric, Les Hommes du jour, n° 63, 3 avril 1909)

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