dimanche 1 juillet 2012

Jules Renard vu par Marcel Proust 1/2

Jules Renard
(Toutes les allusions de cette note  se rapportent aux Histoires naturelles publiées en 1896.)
Il est admirable parce qu'il ne cherche pas d'échappatoires, au contraire de presque tous ceux qui  ne pouvant approfondir leur sensation, au lieu d'insister, de chercher ce qu'il y a dedans, ne s'obstinent pas, glissent ailleurs, ne peuvent y pénétrer davantage et, de ratages  en ratages, finissent par couvrir une immense circonférence, croient que cela finit par être plus beau que, d'un point quelconque, avoir su descendre au centre.
Lui approfondit, saisit la vérité cachée dans la sensation. La vérité tout entière? Non. Il a aussi, mais enfin à une certaine profondeur et après être déjà descendu, ses petites échappatoires, ou plutôt deux métaux différents avec lesquels il finit le corps de son petit poème, n'ayant de vérité que pour un membre. 
Et ces deux autres choses qui font que  ce n'est pas tout vérité et que, quand il sent la vérité manquer, il se jette sur elles pour pouvoir tout de même faire le morceau, garder la vérité qui sans cet alliage serait infime, ce sont la drôlerie et la préciosité. (La pintade: "Elle ne rêve que plaies à cause de sa bosse. Et par terre elle se roule comme une bossue." La poule: " Elle ne pond jamais d’œufs d'or, etc." Le papillon: "Ce billet doux plié en deux cherche une adresse de fleur.")
Suite demain.
(Marcel Proust, Essais et articles, Au temps de Jean Santeuil, Bibliothèque de la  Pléiade, p. 396, 1978)

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