samedi 17 octobre 2015

Journal du 17 octobre 1900

Ils ont été admirables, hier soir, à Poil de Carotte. Il voulait absolument voir ça. Il aurait l'air trop bête, là-bas, si on lui demandait: "Avez-vous vu Poil de Carotte?" et s'il répondait: "Non"
J'arrive dans la loge, les mains vaguement
Lui, rien. Elle a les yeux mouillés tendues, comme c'est l'usage. Si Marinette n'avait pas été là pour me donner la sienne...
Lui, rien. Elle a les yeux mouillés, mais parce qu'elle a vu des fantômes. Et ils rient gros aux Gaîtés de l'Escadron.
Pour les mettre sur la piste, je dis:
- Ils ont mal joué, Antoine me l'a dit.
- Non! non! dit-il. Je n'ai rien trouvé, moi.
Et elle:
-  Oh! c'est parfait.
Un peu plus tard, ils trouvent que les décors sont bien. Il affirme:
- La grille est épatante. Et la fenêtre de la cuisine! On croit y être.
- J'aimerais mieux, dit-elle, qu'Antoine ne parle pas,  parce que ça détruit mon illusion.
C'est tout, et il faut bien que je m'en contente.
Il m'explique qu'il a acheté les Gaîtés de l'Escadron en livraisons, et que, quand il veut rire un quart d'heure.. Courteline a dû faire ses cinq ans. Il faut avoir passé par là.
Et, par-dessus le marché, je paie le vestiaire.
Tout de même, la nuit passée, elle a dû avoir des remords.  Ce matin, elle dit à Marinette:
- Tu comprends? J'avais la gorge serrée. Je n'ai rien pu dire à Jules. D'ailleurs, c'est le meilleur éloge qu'on puisse lui faire.
Ainsi tâche-t-elle de se rattraper, mais elle ne tâche qu'un fois.
J'ai de sombres éclipses où la lumière se recrée.

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