jeudi 30 juillet 2015

Journal du 30 juillet 1897

Mon père. Le lendemain, je me lève de table pour aller pleurer. C'est la première fois, depuis vingt heures que je le veille. Des flots de larmes me montaient aux yeux: pas un n'avait pu sortir. 
Quelle belle mort! Je crois que, s'il s'était tué devant moi, je l'aurais laissé faire. Il ne faut pas diminuer son mérite. Il s'est tué, non parce qu'il souffrait trop, mais parce qu'il ne voulait vivre qu'en bonne santé.
Il aurait dû me le dire. Nous nous serions entretenus de sa mort comme faisaient Socrate et ses amis. Peut-être en a-t-il eu l'idée. Mais je sais bien que j'aurai été stupide. Je lui aurais dit: "Tu es fou! Laisse-moi tranquille, et parlons d'autre chose."
Je crains moins la mort. Je crains déjà moins l'orage. (Ce n'est pas vrai.)
Magnifique exemple! et plus de duel: je me tuerai moi-même quand je voudrai. Il y a du plomb dans ma vie: les chevrotines de sa mort.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

En publiant un commentaire sur JulesRenard.fr, vous vous engagez à rester courtois. Tout le monde peut commenter (Les commentaires sont publiés après modération).