mercredi 14 décembre 2016

mardi 13 décembre 2016

lundi 12 décembre 2016

dimanche 11 décembre 2016

samedi 10 décembre 2016

vendredi 9 décembre 2016

jeudi 8 décembre 2016

mercredi 7 décembre 2016

mardi 6 décembre 2016

dimanche 4 décembre 2016

mercredi 30 novembre 2016

A la manière de Jules Renard - Le cochon

Par un élève de 6ème - Collège Henri Sellier, Colombelles, Calvados
Cliquez sur le texte pour agrandir.

mercredi 23 novembre 2016

A la manière de Jules Renard - L'ours

Par un élève de 6ème - Collège Henri Sellier, Colombelles, Calvados
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mardi 22 novembre 2016

A la manière de Jules Renard - Le guépard

Par un élève de 6ème - Collège Henri Sellier, Colombelles, Calvados
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lundi 21 novembre 2016

A la manière de Jules Renard - Le chien

Par un élève de 6ème - Collège Henri Sellier, Colombelles, Calvados
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vendredi 18 novembre 2016

Poèmes à la manière de Jules Renard

À partir du lundi 21 novembre et jusqu'au 15 décembre 2016, ce blog va publier les poèmes des élèves de deux classes de 6ème de madame Claire Coupard.

Poèmes à la manière de Jules Renard

- Élèves de 6ème 1 du collège Henri Sellier de Colombelles, Calvados
- Élèves de 6ème A du collège Langevin-Wallon de Blainville sur Orne, Calvados

Nous espérons que les lecteurs apprécieront cet hommage à Jules Renard.

mercredi 28 septembre 2016

samedi 24 septembre 2016

jeudi 22 septembre 2016

mercredi 21 septembre 2016

Journal du 21 septembre 1902

Vol silencieux des mouches au plafond. Elles se décollent de leur poutre, entrent dans la quadrille, font quelques tours, et se recollent à la poutre.

mardi 20 septembre 2016

Journal du 20 septembre 1894

Si le dieu préposé à l'art me disait: "Voulez-vous être heureux par moi, mais sans gloire?", je traiterais tout de suite.
Traiterais-je? Est-ce que je ne tiens pas encore un peu aux compliments de telle petite dame?

lundi 19 septembre 2016

dimanche 18 septembre 2016

Journal du 18 septembre 1893

Pour moi, je pense que, travailler quand on n'a pas de génie, c'est comme si on chantait.

samedi 17 septembre 2016

vendredi 16 septembre 2016

Journal du 16 septembre 1901

Le poisson tire le bouchon au fond de ses ténèbres.
La première fois qu'il sort de l'eau, il meurt.
La famille est assise et bavarde. Le soleil couchant se traîne, tout rose, sur le village. Le ciel se mire dans le canal. Quel besoin avez-vous de tuer de petits poissons que vous ne mangerez même pas?

jeudi 15 septembre 2016

Journal du 15 septembre 1893

Son esprit trop tendu éclata comme une peau qui pète, et l'on aurait pu voir, au-dessus de sa tête, un léger nuage qui  qui se dissipa dans l'air.

samedi 30 juillet 2016

lundi 25 juillet 2016

Journal du 25 juillet 1889

Écrire une série de pensées, de notes, de réflexions,  à l'usage de Pierre, intitulées "les Cahiers de Boulouloum".
L'amour:  tu aimeras, c'est-à-dire que tu voudras coucher avec une femme, et que tu auras quelque temps du plaisir à coucher avec cete femme.
Littérature: je ne veux pas te faire un cours. Je peux te dire quels livres j'ai relus, et quels écrivains j'ai aimés.
La musique: pêche à la ligne près du pont de Marigny. D'une fenêtre ouverte dans un cadre de branches m'arrivait une mélodie neuve, et j'étais vivement ému quand, en même temps, mon bouchon se mettait à danser dans l'eau.
La peinture: je souhaite que tu l'aimes et que tu montres plus de goût que moi qui n'ai jamais pu distinguer un tableau d'une impression lithographique en couleurs.

samedi 23 juillet 2016

vendredi 22 juillet 2016

mercredi 20 juillet 2016

Journal du 20 juillet 1887

Son coeur délaissé, abandonné, isolé, plus seul qu'un as de coeur au milieu d'une carte à jouer.

lundi 18 juillet 2016

Journal du 18 juillet 1887

Dites à une femme deux ou trois mots qu'elle ne comprenne pas, d'aspect profond. Ils la déroutent, l'inquiètent, la rendent anxieuse, la forcent à réfléchir, et vous la ramène consciente de son infériorité, sans défense. Car le reste est jeu d'enfant.
Il n'est, bien entendu, pas nécessaire que vous les compreniez vous-même.

vendredi 15 juillet 2016

Journal du 15 juillet 1902

Le coeur. Que d'histoires! Que d'histoire! ils ont tout embrouillé. Tout est à recommencer. A force d'exagération, c'est devenu insignifiant.

mardi 12 juillet 2016

Journal du 12 juillet 1892

Quand elle avait pris ses belles résolutions d'économie, elle commençait tout de suite par refuser aux pauvres.

dimanche 10 juillet 2016

Journal du 10 juillet 1902

Au restaurant, timide toute la soirée, je me rattrape en disant au garçon d'un air sombre: "Donnez-moi du pain rond."

samedi 2 juillet 2016

vendredi 1 juillet 2016

Journal du 1er juillet 1887

Aujourd'hui, déjeuner avec Henry Maret, du Radical. Sans doute, c'est un homme comme un autre, et, malgré cela, un petit tremblement vous secoue à l'approche de ces hommes qu'on  cherche à s'imaginer comme les autres, pour se faire illusion.

mardi 28 juin 2016

Journal du 28 juin 1897

En somme, cette mort a ajouté à mon orgueil.
Le 21 juin, à une heure, on sort le cercueil par le jardin pour que maman et ma soeur n'entendent rien.  Des gens attendent sur la route. La plupart ont l'immortelle rouge à la boutonnière. M. Hérisson est là. Je dis: 
- Nous vous remercions spécialement d'avoir bien voulu venir. 
Je sors dans la rue. Je crois que tout le monde me regarde, qu'après mon père c'est moi le plus important de la cérémonie, et qu'il faut faire une figure. Je la sens dure.
On s'ébranle. Les dix conseillers municipaux se relaient pour porter le cercueil. Contre son bois on entend, à chaque pas, battre les poignées de métal.
On passe devant la mairie et devant l'église. Le soleil nous chauffe la tête. Par toutes les routes il arrive du monde en retard.  Dans une voiture, le père Rigaud, maire de Marigny, âgé de 84 ans, et son fils qui  a l'air plus vieux que lui.
Le cimetière. la fosse est là, dans un coin, près de la route.

dimanche 26 juin 2016

Journal du 26 juin 1905

Lu quelques pages de Stendhal sur Bourges, Mémoires d'un touriste, tome I. Je finirai peut-être par rougir de mon ignorance. Stendhal m'amuse, mais pendant mon année de volontariat à Bourges, je n'ai pas regardé la cathédrale. Quant à l'hôtel de Jacques Cœur, bien des fois j'ai passé devant, au pas accéléré,  pour aller prendre le train de Paris. Je n'ai tout de même pas envie de refaire une année de service militaire. 
Stendhal dit qu'à son arrivée à Bourges il se sentit étouffé par le sentiment de petitesse bourgeoise. Je n'ai d'ailleurs pas senti ça non plus.

samedi 25 juin 2016

Journal du 25 juin 1905

Il y a un Dieu par système planétaire. Ils ont fini, dans l’éternité, par se mettre tous d'accord. Quelquefois, pourtant, ils se fâchent, et brisent des mondes.

vendredi 24 juin 2016

Journal du 24 juin 1907

Ragotte demande:
- Lave-t-on aujourd'hui, madame?
- Mais oui! c'est lundi.
- Oh! je ne dis pas ça pour moi. Moi, ça m'est égal, mais c'est la Saint-Jean.
- Ah! Eh bien!...
- Les domestiques loués entrent chez les maîtres.
- Ah?
- Personne, pas une femme ne va au canal, ce jour-là.
- Bon, bon. Vous ferez la lessive demain.
- Oh! si vous avez quelque chose à me faire laver...
- Demain, demain.
- Si vous avez quelque chose qui presse...
- Non, non.
- Oh! ce n'est pas pour moi. 
- Ce n'est pas pour moi non plus, Ragotte.
Et elle s'habille en noir. Elle ne fera rien. Elle sortira sur la route, tricotant une chaussette.

mercredi 22 juin 2016

mardi 21 juin 2016

samedi 18 juin 2016

Journal du 18 juin 1907

Le maréchal pose, tout seul, une barrière à un nouveau pré du comte. Il dit que le métier se perd parce qu'aujourd'hui on fabrique tout, même les fers à cheval. Il n'y a plus que la pose qui occupe le maréchal. 
Fier de pouvoir travailler en plein air, la poitrine nue.  Il rit comme un nègre. Sa femme lui apporte dans un panier la soupe du soir.  les journées sont si longues qu'il peut travailler à sa barrière jusqu'à huit heures.
Ils sont mariés depuis peu. Ils forment un couple vigoureux. Pourtant, elle a déjà l'ait triste. 
- C'est agréable, dis-je, d'avoir une petite femme qui vient vous voir comme ça pendant votre travail.
- N'est-ce pas, monsieur Renard?
- Vous avez bien fait de la prendre. Bonsoir, les amoureux.
Je m'imagine qu'il vont se coucher là, dans l'herbe, et se caresser après la soupe.
Je m'éloigne, mais comme je marche lentement, une femme me dépasse: c'est la jeune mariée. Elle n'est pas restée près de lui. Elle a laissé le panier. On dit que ses parents l'ont forcée à ce mariage et qu'elle aurait mieux aimé en épouser un autre.

vendredi 17 juin 2016

Journal du 17 juin 1905

A Paris. On reçoit des compliments.
- Oh! vous avez assez de talent pour vous permettre de ne pas aimer la musique.

mercredi 15 juin 2016

Journal du 15 juin 1906

Philippe fauche le foin, mais il ne peut pas me dire le nom des herbes. Comme le pré est en pente, il a un sabot au pied gauche et une savate au pied droit, pour ne pas glisser. A l'entrée du pré, le gilet, le marteau et l'enclume pour redresser la faux avant de l'aiguiser. Les deux traces des pieds dans l'herbe.

mardi 14 juin 2016

Journal du 9 juin 1902

Opéra. La Walkyrie. C'est l'ennui, le carton et la niaiserie du feu de Bengale: un Quatorze juillet à Chaumot. Pas une minute d'émotion, de vraie beauté. Seule, la chevauchée - les Montagnes Russes - dans l'orage, m'amuse. Et ils sont avares.
Que puis-je penser d'une œuvre qui ne touche pas un homme sensible de trente-huit ans? C'est bien la peine de passer sa vie à chercher des impressions vraies, à exprimer des sentiments qui aient le goût de la vérité, avec des mots exacts,  si le bric-à-brac poétique est de la beauté! Ce qui est beau, ridiculement beau, c'est l'Opéra. C'est officiel, ministériel. C'est une espèce de grand café où se donnent rendez-bous les décolletages et les diamants, et des sourds qui veulent faire croire qu'ils entendent.
Un vieux monsieur se plaint qu'on fasse trop de bruit dans les coulisses - on arrête l'orage - et, deux minutes après, il s'endort. C'était donc pour ça! je ne connais rien de plus lâche, de plus dégradant, que ce snobisme.
Ah! vous pouvez, Delmas - oh! cette petite bouche, et cette mèche de cheveux dans l’œil gauche! - Bréval, belle dans votre armure de poisson comme un beau poisson d’argent, vous pouvez chanter: les lorgnettes ne vous regardent pas.
D'ailleurs, on triche. On ne vient qu'au 2e acte, et même qu'au dernier.  Pourquoi si c'est beau? Et puis, ça fait mal aux oreilles. L'un d'eux, qui doit relever d'une otite, a une bande de taffetas sur l'oreille.
- Il a pris ses précautions, dit Guitry, mais il a tort:  ce qui lui entrera par une oreille ne peut sortir par l'autre.
Et que de mollets dès l'entrée! Tous ces larbins qui nous feraient croire que c'est le palais des dieux! Et jamais un contribuable ne se lève pour dire: "Rendez-moi mon argent!"

lundi 13 juin 2016

Journal du 13 juin 1890

Quand je fais une plaisanterie, je regarde la bonne du coin de l’œil, pour voir si elle rit.

samedi 11 juin 2016

Journal du 11 juin 1904

Je ne reçois à la mairie que des prospectus de feux d'artifice. Ils croient donc que nous sommes toujours en fête?

vendredi 10 juin 2016

Journal du 10 juin 1893

C'était un peintre original qui, malgré ses succès, n'avait jamais voulu se faire payer sa peinture plus de 0 fr. 75 l'heure, prix que demande un bon ouvrier.

jeudi 9 juin 2016

mercredi 8 juin 2016

Journal du 8 juin 1904

A Paris, je leur raconte mes histoires d'élections et de mairie:
- Oh! à ce point-là? Et moi qui croyais que tu allais nous faire rire!

mardi 7 juin 2016

Journal du 7 juin 1890

Peut-être qu'un jour on verra la mer sillonnée de routes et les pauvres pêcheurs d'ici, devenus bourgeois et presque amateurs, pêcher en veston de molleton bleu, en pantoufles, et au gaz.

lundi 6 juin 2016

samedi 4 juin 2016

Journal du 4 juin 1895

Tristan Bernard. Son premier soin, en arrivant à l'hôtel, est de demander s'il y a une dépêche pour lui, quoique personne ne sache son adresse. A table, il fait venir un de ces petits commissionnaires belges qui ont des blouses blanches de maçon, et lui donne un mot: "Prière de remettre au porteur toutes les dépêches et lettres adressées à M. Paul Bernard."
- Vous attendez quelque chose?
- Moi? Rien.
Il s'achète une éponge et une petite terrine à fond vert pour se laver la barbe et le reste, et il finit par se laver dans la cuvette de l'hôtel.
Nous cherchons des ressemblances, et nous avons déjà trouvé le père de Paul Hervieu, quand je dis:
- Tiens? sur l'autre trottoir, Alphonse Allais.
Et Alphonse Allais lui-même se retourne et lève les bras au ciel. Il nous invite à déjeuner. Comme le le garçon lui offre des pommes nouvelles:
- Il n'y a rien de nouveu sous le soleil, dit Allais.
Les demis de bière, on les appelle des gendarmes.
Léon Hamelle a déjà mangé un homard, plusieurs tranches de rosbif ; il demande des oeufs durs au garçon qui revient en disant:
- Monsieur, le buffet froid est fermé, et le chef est parti.
La nuit, et le matin de bonne heure, dans les rues, attelages de chiens qui font croire qu'un peuple de nains prend possession de la cité, vit et travaille pendant que dort la race des géants.
Bruxelles, c'est une capitale de province. Les bicyclettes y ont encore des trompes.

vendredi 3 juin 2016

Journal du 3 juin 1890

Le Curé de village de Balzac, un livre où une femme criminelle se réhabilite par l'agriculture!

mercredi 1 juin 2016

mardi 31 mai 2016

dimanche 29 mai 2016

Journal du 29 mai 1909

Théâtre. Parce qu'ils ne montrent pas les hommes politiques tels qu'ils peuvent être, il ne faut pas croire qu'ils les montrent tels qu'ils sont.
Ils font leurs pièces tout près d'un magasin d'habillement.

samedi 28 mai 2016

Journal du 28 mai 1889

L'amitié d'un homme de lettres de talent serait un grand bienfait. Il est fort dommage que ceux dont on désire les bonnes grâces soient toujours morts.

vendredi 27 mai 2016

Journal du 27 mai 1890

Ce qui manque peut-être aux Goncourt, c'est l'art de faire ressortir leurs mots, leurs curiosités de langage, de les mettre en vitrine afin que le badaud s'attarde. On ne s'aperçoit qu'ils ont de l'esprit - et du plus rare - , qu'à la deuxième ou troisième lecture. Mais un honnête homme ne lit pas deux fois la même chose.

jeudi 26 mai 2016

Journal du 26 mai 1890

Je dis à Alix que les pièces qu'on joue sur les planches d'un théâtre sont écrites par des hommes de lettres.
-Il faut qu'ils écrivent rudement vite, dit-il.

mercredi 25 mai 2016

Incipits

À Paris, où les hommes d'étude et de pensée ont quelques analogies en vivant dans le même milieu, vous avez du rencontrer plusieurs figures semblables à celle de M. Rabourdin, que ce récit prend au moment où il est chef de bureau à l'un des plus importants ministères: quarante ans, des cheveux gris d'une si jolie nuance, que les femmes peuvent à la rigueur les aimer ainsi, et qui adoucissent une physionomie mélancolique; des yeux bleus pleins de feu, un teint encore blanc, mais chaud et parsemé de quelques rougeurs violentes: un front et un nez à la Louis XV, une bouche sérieuse, une taille élevée, maigre ou plutôt maigrie comme celle d'un homme qui relève de maladie, enfin une démarche entre l'indolence du promeneur et la méditation de l'homme occupé.
(Honoré de Balzac, Les employés)

Léon de Lora, notre célèbre peintre de paysage , appartient à l'une des plus nobles familles du Roussillon, espagnole d'origine, et qui, si elle se recommande par l'antiquité de sa race, est depuis cent ans vouée à la pauvreté proverbiale des hidalgos.
(Honoré de Balzac, Les comédiens sans le savoir)

Journal du 25 mai 1908

Quand un homme a prouvé qu'il a du talent, il lui reste à prouver qu'il sait s'en servir.

mardi 24 mai 2016

Journal du 24 mai 1906

Promenade à Pazy. j'avais choisi un chemin charmant à travers le bois: il n'était que boue. Chaque fois qu'elle patauge, Marinette dit: "Ça ne fait rien", ou: "J'arrive, sois tranquille. J'essuierai mes pieds dans l'herbe." La femme qui accepte ainsi la boue du chemin, c'est la bonne camarade, qui n'a pas peur de la vie.
Prés gonflés d'une herbe abondante, bien clos d'une haie touffue.
Clocher en bois et isolé sur une hauteur. On s'étonne que la foudre ne l'ait pas encore aperçu. 
Vieilles femmes défiantes, immobiles comme des bornes à leur porte.
Le cantonnier heureux quand quelqu'un passe sur la route.

lundi 23 mai 2016

Journal du 23 mai 1905

Un vent! tous les arbres, comme des désespérés, joignent leurs branches et se plaignent lugubrement.

dimanche 22 mai 2016

Journal du 22 mai 1891

Vu ce matin Barrès. La conversation sur Mallarmé. Cela rapportera des millions, le Grand Œuvre.  Mallarmé disant à sa femme et à sa fille: "Maintenant, vous pouvez y aller: je suis sûr de moi", et les deux femmes ont jeté par la fenêtre quelques sous.
- Mais où en êtes-vous du Grand Œuvre? lui dit Barrès.
- Tenez! dit Mallarmé en lui montrant sur sa table un amoncellement de papiers.
Il s'absente, et Barrès, curieux, feuillette: les copies des élèves de Mallarmé!
On ne peut pas fréquenter Mallarmé sans avoir du génie.
Une réunion des Symbolistes d'après Barrès. Dîner glacial. "Le continuateur de Pascal: Théodore de Banville", dit Morin. Éclats de rire. "Si nous ne voulons pas nous prendre au sérieux, allons-nous-en! dit l'un d'eux.
Finie, la forme du roman. Barrès méprise les paillettes de l'esprit. Ne refera plus de Renan et a préparé un "Taine en voyage" qu'il ne publiera pas.  N'aime que les idées, la métaphysique, qui le grise, et dont on peut jouir sans comprendre.
Prépare des dialogues à la Sénèque.

samedi 21 mai 2016

Journal du 21 mai 1889

- Qu'est-ce qu'il fait donc, Jules?
- Il travaille.
- Oui, il travaille. A quoi donc.
- Je vous l'ai dit: à son livre.
- Faut donc si longtemps que ça, pour copier un livre?
- Il ne le copie pas: il l'invente.
- Il l'invente! Alors, c'est donc pas vrai ce qu'on met dans les livres?

vendredi 20 mai 2016

Journal du 20 mai 1909

Suite d'hier.
Parfois, je la crois de trente ans plus jeune, aux prises, par la ruse avec Poil de Carotte. Mais elle dit, avec une douceur feinte:
- Tu me grondes? Eh bien, c'est raide, ce que tu me dis là!
Elle ferme la porte au nez de Ragotte, mais Ragotte dit:
- C'est le Monsieur qui m'envoie.
La porte s'ouvre.
Trois états: lucidité, amollissement, vraie souffrance. En lucidité, elle est bien toujours Mme Lepic.
elle envoie Philippe nous dire: 
-Ne partez pas!  Je sens bien que je suis perdue.
Dans ses façons de vous tenir les mains et de les serrer, il y a presque des intentions de faire mal.

jeudi 19 mai 2016

Journal du 19 mai 1909

Maman. Sa maladie, ses mises en scènes dans le fauteuil.  Elle se couche quand elle entend le pas de Marinette. 
Ses moments de lucidité. C'est alors qu'elle joue le mieux la comédie.
Elle tremble, se frotte les mains, claque des dents, et, les yeux un peu hagards:
- Qu'est-ce que je vais encore faire! dit-elle. Oh! Je vais m'y mettre.
"Je vais travailler. Quand on travaille..."
Elle fait une reprise à son bas.
Belle vieille encore, figure de sorcière aux traits nets, ou de vieille femme de roulotte, avec ses cheveux blancs ondulés.
Les asperges qu'on lui offre, elle les donne aux lapins.
Les femmes viennent la voir comme des voleuses. Elle n'a plus une chemise, ni un drap: elle a tout donné.
Elle finissait par dire: "Je n'ai plus besoin d'argent."
Suite demain.

mardi 17 mai 2016

Journal du 17 mai 1906

Ne pas écrire trop serré. Il faut aider le public avec de petites phrases banales. Daudet savait les intercaler.

dimanche 15 mai 2016

vendredi 13 mai 2016

jeudi 12 mai 2016

Journal du 12 mai 1892

Oh! ces retours de courses au bois de Boulogne, ces figures tristes, ces cochers blêmes, ces gens qui se dévisagent sérieusement, sans un mot, enfoncés dans leur voiture, la main du cocher qui se lève pour prévenir le cocher qui suit! Les chevaux sont les plus gais en agitant la tête.
Les vieux qui ont leurs filles pour maîtresses.  Et ces grues! Ces gens reviennent de s'amuser.

mercredi 11 mai 2016

Journal du 11 mai 1893

D'esparbès nous disait l'autre jour:
- J'ai fait deux lâchetés dans ma vie: j'ai dédié deux contes, l'un à Coppée, l'autre à Theuriet.
Or, ce matin, Coppée vient de payer royalement la première par un article de tête du Journal. Theuriet ne se fera pas attendre.

Actualité littéraire

Écrire en artistes des Goncourt à Proust
Textes rassemblés et présentés par
Pierre-Jean Dufief et Gabrielle Melison-Hirchwald
Romantisme et Modernités N° 161
1 vol., 312 p., broché, 15 × 22 cm
ISBN 978-2-7453-2904-2
CHF 55 ht / 55 € ttc

mardi 10 mai 2016

lundi 9 mai 2016

Journal du 9 mai 1893

Si l'on ne m'avait pas fait croire que j'étais un grand artiste, j'eusse fait de belles choses.

samedi 7 mai 2016

Journal du 7 mai 1907

Gérault-Richard me raconte ses griefs contre Jaurès. Aucune sensibilité; à la fois impérieux et lâche, il a tout supporté de Gohier. Leur brouille date de la fondation de l'Humanité. Gérault devait être rédacteur en chef. Il avait trouvé 200.000 francs, Jaurès, une centaine de mille, fournis par des petits juifs, qui demandaient 5.000 francs d'appointements. Ils ont obligé Jaurès à écarter Gérault.
-Simple ouvrier dit-il, j'ai pu devenir journaliste. Je ne serai jamais que journaliste.
Il brûle d'envie d'être ministre.

vendredi 6 mai 2016

jeudi 5 mai 2016

Journal du 5 mai 1890

"Ma peur en me mariant, dit la jeune femme, et je n'en avais pas d'autre, c'était d'avoir besoin d'aller aux cabinets pendant la bénédiction nuptiale."

mercredi 4 mai 2016

Journal du 4 mai 1904

Honorine n'a plus qu’une oreille pour entendre un peu, la droite. Elle s'approche le plus possible, jusqu'à nos pieds,  de façon que les paroles tombent dans son oreille comme une vieille soucoupe. Ainsi calée, elle a l'air d'être bossue de dos, et bossue de côté. 
Elle a beau faire: elle est sourde, et il faut lui parler double.

mardi 3 mai 2016

Journal du 3 mai 1893

Tout glorieux de s'être mis le monde à dos, Poil de Carotte se sauve. Il quitte sa famille. Il arrive au bois, hésite, un peu effrayé devant cette masse ténébreuse qui lui cache le ciel, l'avenir. 
- Au moins, si je suis malheureux, dit-il, j'aurai fait mon malheur moi-même.

lundi 2 mai 2016

Journal du 2 mai 1908

- Le frère de Mariette est si jaloux, dit Ragotte, que sa femme est "polcas" (n'est pas dans le cas, n'a pas la possilbilité) d'aller pisser dehors la nuit.
Quand il travaille au loin, il l'oblige à aller coucher tous les soirs, avec ses deux enfants, chez sa mère, à La Chaise. Quand il empile sur le port, on lui crie tout à coup:
- Ah! j'en vois une bonne bande!
- Où donc?
- Devant ta porte, pardié!
Il bondit comme un chat sur une pile, regarde, ne voit rien, et saute à bas sans rien dire, le coeur plein de rage.

dimanche 1 mai 2016

Journal du 1er mai 1891

Qu'est notre imagination, comparée à celle d'un enfant qui veut faire un chemin de fer avec des asperges.

vendredi 29 avril 2016

Journal du 29 avril 1890

En ce moment, le port de Barfleur est bleu d'eau de Javel, comme si un peuple de blanchisseuses venaient d'y laver le linge.

jeudi 28 avril 2016

Journal du 28 avril 1903

Décor du deux. Wolff écoute la pièce, marche d'abord, puis disparaît sans rien dire. Je ne sais plus. Il me dit plus tard qu'il a trouvé la scène longue, tant Antoine la savait peu.
Ellen Andrée pleure tout à coup et finit de jouer sa scène en pleurant.
Quelle détresse! Voilà que je mendie presque des compliments.
- Est-elle claire, la pièce? demandé-je à Wolff.
- Claire comme de l'eau de roche. Antoine aura un gros succès... Cheirel est délicieuse.
J'insiste pour qu'il ne paie pas la moitié de sa voiture, et je rentre chez moi avec la peur du désastre. 
Le soir, j'emporte mes deux actes chez Antoine, et, tandis qu'il se dénapoléonise, je lui lis la scène comme je l'ai lue à Guitry, à Brandès, et c'est le même effet. Il dit: 
- Oui, c'est ça! Çà y est! Il faudrait jouer comme vous lisez, et ce serait sûr.

mercredi 27 avril 2016

Journal du 27 avril 1900

Borneau travaille douze heures par jour et ne gagne pas cent sous. Son fils qui l'aide en gagne cinquante-cinq, mais n'a aucun goût au métier.  Sa fille, Lucie, n'a aucun goût au ménage, ce qui le désole. Pierre, son plus petit, qui est enfant de chœur et se se saoule déjà au point de se jeter, avec ses burettes, dans la soutane de M. le curé, veut être valet de chambre.
Borneau voudrait avoir une bicyclette pour aller à son travail et en revenir, mais c'est trop cher. Il ira à l'exposition à Paris, où il a deux sœurs. Il couchera chez elles, sur une paillasse, et il se promènera, toute la journée, avec un jambon sur l'épaule au bout d'un bâton. Encore un voyage qui va bien lui couter cinquante francs! Diable le pète, c'est vrai.
Il parle surtout à Philippe, et ils causent tous deux comme si je n'étais pas là. Quand il s'en va, comme il ne sait si je vais lui tendre la main, il me tourne tout de suite le dos, et je tends la main à son derrière.
Il ne lit  le Petit Parisien qu’en hiver, aux veillées. En été, il n'a pas le temps. Il travaille et il dort.

lundi 25 avril 2016

samedi 23 avril 2016

vendredi 22 avril 2016

mercredi 20 avril 2016

Journal du 20 avril 1893

L'humide fraîcheur qui se répand par nos membres à une violente surprise, comme si tout notre sang prenait un bain froid.

mardi 19 avril 2016

Journal du 19 avril 1899

Elle se défie de son homme et ne lui dit rien de ses affaires. Elle a du bien pour plus de 80.000 francs, et il ne s'en doute pas.On lui offre d'acheter ses vignes à l'amiable: elle accepte le prix. Son notaire, qui n'a rien sur la vente, lui dit qu'elle fait une bêtise. Troublée, et n'ayant rien signé, elle reprend tranquillement sa parole.
Il faut qu'elle ait toujours dans son armoire un billet de cent francs d'avance.
Rien ne l'obligerait à déplacer son argent placé. Elle aime mieux emprunter et payer des intérêts avec ses revenus.
Venant à Paris en seconde, elle avait droit à l'express à partir de Laroche. Pas pressée, elle a préféré rester dans le train omnibus.
Plus elle amasse, et plus elle est désolée que ses enfants n'aient pas d'enfants. A qui tout ce bien va-t-il aller?
Sur le retour, elle a des éblouissements, des lourdeurs. elle va trouver son pharmacien qui lui donne une purge et lui dit que ça passera.
Elle a moins peur de mourir que de quitter son bien.
- Je n'ai pas besoin d'eux, dit-elle de ses enfants. Qu'ils tâchent de n'avoir pas besoin de moi.

lundi 18 avril 2016

Journal du 18 avril 1903

L'Aiglon. - Oui, c'est un autre monde, mais cela m'émeut à chaque instant. Rostand ne s'interdit rien, mais il en profite. Toutes les ficelles, oui, mais pour attacher tous les oiseaux, des aigles et des chardonnerets.
On a beau avoir horreur de la guerre: Victor Hugo et Rostand finissent presque par faire accepter les tueries de Napoléon.
Çà m'écrase. Et tout ce mouvement me donne envie de faire du théâtre assis.

samedi 16 avril 2016

Journal du 16 avril 1906

Maman; non, non, je ne mentirai pas. Jusqu'au bout, je dirai que ça m'est égal.
Elle vient. Marinette la fait entrer en disant:
- C'est grand-mère.
Elle m'embrasse (moi, je ne peux pas),  s'assied tout de suite avant d'en être priée. J'ai dit:
- Bonjour, maman. Ça va bien?
Pas une syllabe de plus.
Mais il n'en fallait pas plus. Elle parle toute seule. Elle dit:
- Je viens de voir Honorine pour la dernière fois. Elle s'en va. Elle ne reconnaît plus. Elle doit avoir beaucoup de fièvre. Ses petites-filles lui donnaient à boire dans une tasse sale, sale!...Ah! s'il me fallait boire dans une tasse pareille!... Ah! mes enfants, quand je serai vieille, plus bonne à rien, à votre charge, donnez-moi une pilule.
- C'est promis, dit Marinette. vous l'aurez. Allons un peu causer dans ma chambre.
Et il faut que maman se lève et la suive. Tout était réglé comme pour une froide cérémonie.
- Et toi, tu vas bien , mon Jules?
- Pas mal.
Tant mieux!
Dehors, elle embrasse Marinette et la remercie. Je suis troublé. Je ne suis pas touché. C'est la situation qui m'émeut: ce n'est pas ma mère. Ah! c'est la vieille femme à qui je ressemblerai plus tard. Cheveux gris encore ondulés, la chair s'en va. La peau se plaque, comme elle peut, sur les os qui prennent une importance!... Et il y a des croûtes sur la peau comme sur le bois qu'on ne repeint jamais.

vendredi 15 avril 2016

jeudi 14 avril 2016

Journal du 14 avril 1899

Pour un écrivain qui vient de travailler, lire, c'est monter en voiture après une marche à pied pénible.

mardi 12 avril 2016

Journal du 12 avril 1892

Le document. Zola, pour écrire la Terre, prenant une voiture à l'heure et se faisant promener par la Beauce.

lundi 11 avril 2016

Journal, un jour d'avril 1898

Au cimetière. Je tâche de m'imaginer la chose horrible qu'est maintenant le visage de mon père, et je sens la grimace que fait mon visage à moi.

dimanche 10 avril 2016

Journal du 10 avril 1891

Il m'est venu à l'idée de faire de l’Écornifleur une des attitudes de Poil de Carotte; quelque  chose comme ses expériences sentimentales. Ce serait mon Tartarin à moi. On aurait Poil de Carotte de trois à douze ans, Poil de Carotte à vingt ans, et, plus tard, Poil de Carotte de douze à vingt ans.

samedi 9 avril 2016

Journal du 9 avril 1890

A vingt six ans, on a tellement appétit du neuf et peur de se répéter qu'on ne se sert jamais de ses notes.

vendredi 8 avril 2016

Journal du 8 avril 1907

J'ai une mémoire admirable: j'oublie tout! C'est d'un commode!... C'est comme si le monde se renouvelait pour moi à chaque instant.

jeudi 7 avril 2016

Journal du 7 avril 1906

Quand ces vaudevillistes veulent écrire, ils ne trouvent même pas le style d'un vieux général.

lundi 4 avril 2016

Journal du 4 avril 1906

Réussir au théâtre sans la presse, sans les amis ni les ennemis, sans première ni répétition générale, voilà le rêve.

jeudi 31 mars 2016

Journal du 31 mars 1904

La vielle a voyagé cet hiver. elle est allée chez sa fille, chez une soeur, et même chez son fils, qui est riche.
Elle n'a pas le sou. Elle loge dans une ancienne buanderie qui n'a pas de fenêtre et qui n'a qu'une porte. elle dit, un peu humiliée:
- Ne venez pas me voir maintenant! Je suis trop mal logée. Oh! Je n'y resterai pas longtemps: ils vont venir le chercher.
"Ils", c'est sa fille, ou son fils, le richard.
Comme elle est sourde, maman, qui a de l'esprit, dit tout haut:
- Et, si ceux-là ne viennent pas, la mort viendra bien vous prendre.

mercredi 30 mars 2016

Journal du 30 mars 1893

Il faudrait faire du théâtre satirique avec la netteté d'un Beaumarchais et l'abondance d'un Rabelais.

Incipit

Elle ouvrit doucement la porte, et resta un moment sur le seuil, immobile, tenant levée sa main à mitaine noire.
(Georges Bernanos, La joie)

Depuis un moment, ils se tenaient immobiles, debout à quelques pas l'un de l'autre, et Mes Dare feignait de lire la lettre qu'il venait de lui tendre, mais il y avait plusieurs secondes déjà qu'elle avait pris connaissance de ce document et maintenant,  du coin de l’œil, elle observait le nouveau venu.
(Julien Green, Moïra)

Je ne sais pas, en vérité, pourquoi l'homme tient à la vie; que trouve-t-il donc de si agréable dans cette insipide succession des nuits et des jours de l'hiver et du printemps? Toujours le même ciel, le même soleil; toujours les mêmes  prés verts et les mêmes champs jaunes; toujours les mêmes discours de la couronne, les mêmes fripons et les mêmes dupes. Si Dieu n'a pu faire mieux, c'est un triste ouvrier, et  le machiniste de l'opéra en sait plus que lui.
(Claude Tillier, Mon oncle Benjamin)

mardi 29 mars 2016

Journal du 29 mars 1905

Claretie, une belle vie pour un discours funèbre.

Incipits

La vérité n'est pas le contraire du mensonge, trahir n'est pas le contraire de servir, haïr n'est pas le contraire d'aimer, confiance n'est pas le contraire de méfiance, ni droiture de fausseté.
(Francis Walder, Saint-Germain ou la négociation)

Le mariage fut célébré à Saint-honoré d'Eylau.
(Marcel Aymé, Travelingue)

- Mon cher enfant, dit l'abbé Cénabre, de sa belle voix lente et grave, un certain attachement aux biens de ce monde est légitime, et leur défense contre les entreprises d'autrui, dans les limites de la justice, me semble un devoir autant qu'un droit.
(Georges Bernanos, L'imposture)

lundi 28 mars 2016

Journal du 28 mars 1906

Théâtre. Triomphes, succès d'estime, fours, tout ça fait de la célébrité, et qu'on est un monsieur dont il est parlé. Et, au fond, ils ne tiennent qu'à ça, et à l'argent.

Incipits

Ils ont eu une exquise pensée, mes élèves et collègues de la Faculté: voici, précieusement relié et solennellement apporté, le premier exemplaire de ce livre d'hommage qu'à l'occasion de mon soixantième anniversaire et du trentième de mon professorat les philologues m'ont consacré.
(Stéphane Zweig, La confusion des sentiments)

C'est la première fois que Philippe voyage en Wagon-lits.
(Claude Aveline,  Madame Maillart)

Anna se morfondait sur le quai de la gare.
(Claude Aveline,  La fin de madame Maillart)

dimanche 27 mars 2016

Journal du 27 mars 1908

Philippe. Il ne faudrait pas, à la fin, s'attendrir. Il faudrait montrer que tout ce que j'ai pu dire, depuis douze ans, à cet homme, et rien, c'est la même chose, ou, plutôt, qu'il est capable d'une certaine affection, mais qu'il ne l'est d'aucune compréhension.Je le retrouve avec le même esprit de servitude, au point qu'il ne se révolte pas pour l'honneur de sa fille.

Incipits

Le premier lundi du mois d'avril 1625, le bourg de Meung, où naquit l'auteur du Roman de la Rose, semblait être dans une révolution aussi entière que si les huguenots en fusent venus faire une seconde Rochelle.
(Alexandre Dumas, Les trois mousquetaires)

Dans une chambre du palais Cardinal que nous connaissons déjà, près d'une table à coin de vermeil, chargée  de papiers et de livres, un homme était assis la tête appuyée dans ses deux mains.
 (Alexandre Dumas, Vingt ans après)

Vers le milieu du  mois de mai de l'année 1660, à neuf heures du matin, lorsque le soleil déjà chaud séchait la rosée sur les ravenelles du château de Blois, une petite cavalcade, composée de trois hommes et de deux pages, rentra par le pont de la ville sans produire d'autres effets sur les promeneurs du quai qu'un premier mouvement de la main à la tête pour saluer, et un second mouvement de la langue pour exprimer cette idée dans le pur français qui se parle en France:
- Voici Monsieur qui revient de la chasse.
Et ce fut tout.
(Alexandre Dumas, Le vicomte de Bragelonne)

samedi 26 mars 2016

Journal du 26 mars 1904

A la Société des gens de lettres. Jho Pale, un pauvre bougre de lettres, me dit:
- Vous avez là-bas un homme politique qui vous admire beaucoup: c'est de Bhray. Il est aussi anticlérical que vous, mais il a une situation de 12000 francs.
Voilà leur excuse.

Incipits

La salle est haute et vaste. Elle est longue, et se prolonge dans une ombre où elle s'enfonce sans finir.
(Edmond et Jules de Goncourt,  Sœur Philomène)

vendredi 25 mars 2016

Journal du 25 mars 1909

Antoine en veut encore pour vingt ans. dit qu'il se porte bien, veut mourir d'une angine de poitrine à soixante-douze ans. Il ne boit que de l'eau, et deux ou trois gouttes par jour.

Incipits

Le tourniquet saint-Jean, dont la description fut fastidieuse en son temps au commencement de l'étude intitulée une Double Famille (voir Scènes de la vie privée), ce naïf détail du vieux Paris n'a plus que cette existence typographique.
(Honoré de Balzac, Les petits bourgeois)

Vers le milieu du mois de juillet de l'année 1838, une de ces voitures nouvellement mises en circulation sur les places de Paris et nommée des milords, cheminait, rue de l'Université, portant un gros homme de taille moyenne, en uniforme de capitaine de la garde nationale.
(Honoré de Balzac, La cousine Bette)

Vers trois heures de l'après-midi, dans le mois d'octobre de l'année 1844, un homme âgé d'une soixantaine d'année, mais à qui tout le monde eût donné plus que cet âge, allait le long du boulevard des Italiens, le nez à la piste, les lèvres papelardes, comme un négociant qui vient de conclure une excellente affaire, ou comme un garçon content de lui-même au sortir d'un boudoir.
(Honoré de Balzac, Le cousin Pons)

jeudi 24 mars 2016

Journal du 24 mars 1900

Les habilleuses, assises et chuchotant dans les coins, pauvres vieilles que les étoiles rabrouent et qui ne peuvent se rendre supportables que par leur flatteries.

Incipits

Lorette est un mot décent inventé pour exprimer l'état d'une fille ou la fille d'un état difficile à nommer, et que, dans sa pudeur, l'Académie française a négligé de définir, vu l'âge de ses quarante  membres.
(Honoré de Balzac, Un homme d'affaires)

- Mon cher ami, dit madame de la Baudraye en tirant un manuscrit de dessous   l'oreiller de sa causeuse, me pardonnerez-vous, dans la détresse où nous sommes, d'avoir fait une nouvelle de ce que vous nous avez dit, il y a quelques jours?
(Honoré de Balzac, Un prince de la Bohême)

Savoir vendre, pouvoir vendre, et vendre! Le public ne se doute pas de tout ce que Paris doit de grandeurs à ces trois faces du même problème. 
(Honoré de Balzac, Gaudissart II)

mercredi 23 mars 2016

Journal du 23 mars 1905

Au jardin d'acclimatation. Le cheval nain, "le plus petit qu'on ait trouvé", explique le vilain nain qui le garde.  Quoique petit, il est bien fait.  Le nain, une bague au doigt, est heureux d'avoir un cheval à sa taille, mais il est encore plus fier de faire aller et venir la girafe derrière sa grille en l'appelant "Paule".
Un nain: une poire qui se serait racornie en pomme.
Tous ces oiseaux étranges donnent envie de voir un merle.
Le mâle toujours plus beau que la femelle.
Au milieu de ces oiseaux exotiques, les poules ont l'air de braves honnêtes femmes.
Au moindre rayon de soleil, un aigle se cache dans un coin d'ombre de sa cage.
Le Cygne au ventre plat semble glisser sur l'eau comme sur une table.
Il faut le voir filer quand un petit canard lui flanque une poursuite.
Plantes de serre: plantes à l'hôpital.

mardi 22 mars 2016

Journal du 22 mars 1902

Société des gens de lettres. M. de Saint-Arroman, qui préside, ayant dit que M. Alfred Capus n'est peut-être pas le premier que par ordre alphabétique, personne ne proteste, mais personne n'approuve. Il ne faut pas faire de ces plaisanteries à des gens de lettres. 
Georges Renard, un Zola maigre et blanc, un exilé, me dit: 
- On me demande souvent, monsieur, si je suis parent de M. Jules Renard.
Le vote, une arme sournoise et dégradante.
Femmes de lettres, leur laideur, leurs ridicules petits chapeaux verts. Les plus jeune ont des allures masculines: on dirait qu'elles font de la littérature.

lundi 21 mars 2016

Journal du 21 mars 1908

Société des gens de lettres. Tant de gens dont je n'ai pas lu une lettre! Toutes ses femmes laides qui disent: " Vous croyez que c'est un avantage, d'être femme?"
La pauvre délégué, toujours attaqué, se défend par des grognements timides. comme un chien qui tient à sa chaîne. Pierre Sales: de la facilité au début, peu de fonds.
Jules Bois, en habit, traite tout cela de ragots de portière et ajoute: "C'est le bon sens qui parle." 
Personne ne répond. C'est le Comité muet, et pourtant il y a une femme, Mme Lesueur.
Et tous ces pauvres hommes qui viennent à la petite heure déclarer qu'ils sont assidus, dévoués, compétents, qu'ils rendront des services, tout cet étalage de vertus médiocres! Vibert seul dit qu’il en  est écoeuré. Aussi y-a-t-il vingt-trois ans qu'il se présente inutilement.
Une femme se décide à parler. Personne ne l'écoute plus.

dimanche 20 mars 2016

Journal du 20 mars 1909

Blum, toujours très intelligent et précis, défend Porto-Riche.
Fauchois s'obstine à dire qu'il est très content du succès de Beethoven pour Antoine.
- Les juifs vous aiment beaucoup, me dit Trarieux.
- En effet. Ils ne me disent rien de désagréable.
- Ils n'osent pas, insinue Trarieux.
Antoine toujours gêné au milieu d'hommes d'esprit. Quand il veut dire quelque chose, il fait un effort désespéré et ses petits yeux se rapprochent de son nez.

Incipits

Je demeurais alors dans une petite rue que vous ne connaissez sans doute pas, la rue de Lesdiguières: elle commence à la rue  Saint-Antoine, en face d'une fontaine près de la place de la Bastille, et débouche rue de la Cerisaie.
(Honoré de Balzac, Facino cane)

J'étais plongé dans une de ces rêveries profondes qui saisissent tout le monde, même un homme frivole, au sein des fêtes les plus tumultueuses.
(Honoré de Balzac, Sarrasine)

Toutes les fois que vous êtes sérieusement allé voir l'Exposition des ouvrages de sculpture et de peinture, comme elle a lieu depuis la révolution de 1830, n'avez-vous pas été pris d'un sentiment d’inquiétude,  d'ennui, de tristesse, à l'aspect des longues galeries encombrées?
(Honoré de Balzac, Pierre Grassou)

samedi 19 mars 2016

Journal du 19 mars 1901

Poil de Carotte. Tournée Barret. Mme Grassot, qui va jouer Mme Lepic à Gand, dit qu'elle est depuis vingt ans à Paris.
- Çà remonte loin!
- Oh! moi, dit-elle, maintenant je remonte toujours.
On voit une belle jeune femme, qui pourrait être  une honnête grue bien riche, heureuse d'aller, pour dix francs ou cent sous, jouer le rôle d'Annette en province. 
On répète dans une espèce de maison garnie où il faut sonner à toutes les portes avant d'arriver à la vraie. Un poêle avec une tasse d'eau dessus.

Incipit

Il s'est rencontré, sous l'Empire et dans Paris, treize hommes également frappés du même sentiment, tous doués d'une assez grande énergie pour être fidèles à la même pensée, assez probes entre eux pour ne point se trahir, alors même que leurs intérêts se trouvaient opposés, assez profondément politiques pour dissimuler les liens sacrés qui les unissaient, assez forts pour se mettre au-dessus de toutes les lois, assez hardis pour tout entreprendre, et assez heureux pour avoir toujours réussi dans leurs desseins; ayant couru les plus grands dangers, mais taisant leurs défaites; inaccessibles à la peur, et n'ayant tremblé  ni devant le prince, ni devant le bourreau, ni devant l'innocence; s'étant acceptés tous, tels qu'il étaient, sans tenir compte des préjugés sociaux; criminels sans doute, mais certainement remarquables par quelques-unes des qualités qui font les grands hommes, et ne se recrutant que parmi les hommes d'élite.
(Honoré de Balzac, Histoire des treize)

vendredi 18 mars 2016

Journal du 18 mars 1890

"Avez-vous lu Monsieur Vénus ? Avez-vous lu la Terre ?" Et, si oui, c'est des effarouchements, des pudeurs, des reculs de buste. Franchement, je ne vois pas quelle lecture peuvent s'interdire des femmes mariées qui font, ou ont le droit de faire la bête à deux dos toute les nuits.

Incipits

Durant les nuits d'hiver, le bruit ne cesse dans la rue Saint-Honoré que pendant un instant; les maraichers y continuent, en allant à la Halle, le mouvement qu'ont fait les voitures qui reviennent du spectacle ou du bal.
(Honoré de Balzac, César Birotteau)

Vous savez combien sont minces les cloisons qui séparent les cabinets particuliers dans les plus élégants cabarets de Paris.
(Honoré de Balzac, La maison Nucingen)

jeudi 17 mars 2016

Journal du 17 mars 1894

Pierre Sales raconte à Collache mon élection. Devant l'hostilité de quelques vieux membres, Zola dit: "Messieurs, si nous ne sommes pas sûrs de faire passer M. Jules Renard, il faut remettre l'élection, car la Société des Gens de lettres se rendrait ridicule." Et M. Edmond Thiaudière ajouta: "Je viens seulement de lire un de ses livres: c'est plein de chefs-d’œuvre.

Incipits

Dans une des moins importantes préfectures de France, au centre de la ville, au coin d'une rue, est une maison; mais les noms de cette rue et de cette ville doivent être cachés ici.
(Honoré de Balzac, Le cabinet des antiques)

À l'époque où commence cette histoire, la presse de Stanhope et les rouleaux à distribuer l'encre ne fonctionnaient pas encore dans les petites imprimeries de province.
(Honoré de Balzac, Illusions perdues)

mercredi 16 mars 2016

Journal du 16 mars 1901

Soyons artistes! ne nous occupons ni de gagner de l'argent, ni d'être conseillers municipaux, ni d'être membre du comité d'une section de la ligue des Droits de l'homme. Nos pères n'avaient qu'à gagner de l'argent. S'ils en gagnèrent assez, c'est bien: merci! Dépensons-le. S'ils n'en ont pas assez gagné, ils ont eu tort: ce sont les coupables.

Incipits

En 1824, au dernier bal de l'Opéra, plusieurs masques furent frappés de la beauté d'un jeune homme qui se promenait dans les corridors et dans le foyer, avec l'allure des gens en quête d'une femme retenue au logis par des circonstances imprévues.
(Honoré de Balzac, Splendeurs et misères des courtisanes)

Après les désastres de la révolution de juillet qui détruisit plusieurs fortunes aristocratiques soutenues par la cour, madame la princesse de Cadignan eut l'habileté de mettre sur le compte des événements politiques la ruine complète due à ses prodigalités.
(Honoré de Balzac, Les secrets de la princesse de Cadignan)

mardi 15 mars 2016

Journal du 15 mars 1898

Le Pain de ménage. Au Figaro. Veber, ce soir:
- Eh bien, Renard, avez-vous digéré votre succès?
- Et vous? lui dis-je.
Hervieu préfère le Plaisir de rompre. Çà a été un succès aussi délicieux à la répétition générale, moins l'étonnement. Dès les premières phrases, je suis tranquille. Je ne suis plus auteur, et je me laisse charmer, et j'applaudis comme le public, qui accompagne la pièce comme s'il l'avait écrite. Brandès et Guitry me disent: 
- Nous avons dû  les calmer d'autorité; sans quoi, nous n'aurions pas pu dire une phrase.
Trois ou quatre rappels à le fin, et mon nom tombant comme une mare à grenouilles charmantes.
Me voilà bien! Sans ce nouveau succès, j'aurais peut-être fait cinq actes passables. Maintenant, tout m'est interdit, excepté le merveilleux.
Le soir, je rejoins Guitry qui dîne avec Noblet chez Joseph, restaurateur de la rue Marivaux. Ce Joseph découpe un canard comme s'il jouait du violon, et nous sert une fine, si chère qu'il ne peut pas la vendre et préfère l'offrir à ses amis.
Tout de même je n'ai même pas osé embrasser Brandès.

lundi 14 mars 2016

Journal du 14 mars 1898

- Le Pain de ménage.  Et si l'on criait bis! jusqu'à ce qu'on le joue une seconde fois dans la même heure?
Dans la satisfaction de mes amis, quelque chose qui m'inquiète, comme s'ils étaient gais parce que ce n'est pas trop, trop bien.
C'est aussi une pièce dont on dit hélas! "Il faudra que je l'entende une seconde fois."

Incipits

Sur la lisière du Berri se trouve, au bord de la Loire, une ville qui par sa situation attire infailliblement l’œil du voyageur.
(Honoré de Balzac, La muse du département)

Beaucoup de personnes ont dû rencontrer dans certaines provinces de France plus ou moins de chevaliers de Valois, car il en existait un en Normandie, il s'en trouvait un autre à Bourges, un troisième florissait en 1816 dans la ville d'Alençon, et peut-être le midi possédait-il le sien.
(Honoré de Balzac, La vieille fille)